Sophia Domancich trio : Funerals

Chaos et instants de sérénité, sentiers buissonniers et échappées subtilement balisées, musique envoûtante comme un voyage amoureusement concocté. Et l’immense plaisir de se laisser prendre la main par un guide aussi charmant. Sophia Domancich part à la découverte de paysages de contrastes tout en se permettant quelques incursions sur des terres déjà explorées. Au programme : finesse de jeu, musicalité et élégance. Fragilité aussi, comme dans ce chant aux accents désespérés qui évoque Robert Wyatt ou Phil Minton. Et puis d’autres grands aînés dont elle effleure furtivement l’œuvre comme pour mieux leur rendre un discret hommage : Jean-Paul Céléa, peut-être, pour la formidable dynamique du son à la contrebasse et le jeu à l’archet d’un musicien dont il faudra reparler. Carla Bley, Dvorak, Charlie Haden ou Christian Vander aussi, dans ces riches arrangements de cuivres, sombres et magnifiques comme les longues nuits du Grand Nord (un beau travail des frères Guillard et de Gérard Lhomme à la console de mixage). Instants graves aussitôt enluminés par la limpidité d’une pianiste qui utilise toutes les ressources de l’instrument (notes étouffées, dynamique du clavier, percussions, etc.). Le trio de la belle Sophia sait swinguer quand il le décide et occuper l’espace avec une rare ampleur. Surtout, il ne ressemble à aucun autre. Un rêve de musique dans lequel on se laisse emporter. Loin. Très loin. L’une des voix les plus originales qu’il m’ait été donné d’écouter ces derniers temps dans les mondes du jazz.

Pascal Kober

Musiciens  : Sophia Domancich (p), Paul Rogers (b et Bruno Tocanne (dm).
Musiciens additionnels : Alain Guillard (s), Yvon Guillard (tp), Jérôme Naulais (tb) et John Greaves (voc).
Thèmes  : Funerals, Lydia, Subtil, Défilé, B. Rubatto, Mardi Gras, Back Where We Began, Funerals 2, Derision.
Enregistré : en juillet 1991 à Chennevières-sur-Marne.
Durée : 55′ 10″.
Référence : Gimini Music GM 1001 (distribution : Harmonie).
Site Internet : cliquer ici.

Chronique publiée dans le numéro 494, daté novembre 1992, de la revue Jazz Hot.

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