J’ai rêvé de vivre à Montréal. Ou à San Francisco. Comme nombre de gamins : un rêve d’Amériques ! J’ai même rêvé de publier un transatlantique à la une de L’Alpe pour dire que le champ d’action d’une revue comme celle-ci reste ouvert au monde, ouvert aux autres. Mission accomplie pour ce troisième rêve.
Les habitants des Alpes ont toujours eu la bougeotte. Colporteurs, ils allaient vendre leurs graines jusqu’à la cour des tsars de Russie. Et contrairement à une idée reçue, ni le froid ni la faim ne les poussaient à franchir le col pour découvrir d’autres horizons. Seul les animait le goût d’entreprendre.
Ainsi, saviez-vous que le blues est aujourd’hui enseigné à l’université de Caroline du Sud par un professeur suisse ? Que la guitare électrique n’aurait pas été inventée de la même façon sans un autre émigrant d’origine helvétique ? Que des maçons de Haute-Savoie ont bâti l’un des plus anciens clubs de jazz de La Nouvelle-Orléans ? Que si le cap Horn est chilien plutôt qu’argentin, il le doit peut-être aussi à des producteurs de gruyère ? Que les moutons de Californie ont fait la fortune d’un pâtre piémontais ? Et enfin, le Mexique des Barcelonnettes : imaginiez-vous à quel point il pouvait entretenir, actuellement plus que jamais, une vraie ferveur populaire autour des patrimoines et du partage des cultures ?
Ces aventures, elles sont contées dans le numéro 46, daté automne 2009, de L’Alpe qui marque une autre migration, certes plus modeste, celle de la rédaction de la revue, qui va quitter, en cet automne 2009, ses bureaux historiques du Musée dauphinois, sur les hauteurs de Grenoble. Jacques Glénat, notre éditeur, vient en effet d’installer son siège social dans le couvent Sainte-Cécile qu’il a fait rénover en plein cœur de ville. Il y fêtera également ses quarante ans d’édition. L’occasion de saluer une autre belle aventure, osée, exigeante et passionnée. Plus de dix ans après sa création, L’Alpe en témoigne par son existence même. Longue vie et bon vent !
Pascal Kober